Agriculture biologique (très) près de chez nous
Entretien avec la famille Yobé, à la ferme des Goublayes
Fréhel Environnement a la volonté de promouvoir les circuits courts et l’agriculture biologique dans
notre région.
Dans ce cadre, par un bel après-midi de cet été, nous sommes allés à la rencontre de la famille Yobé,
précurseur en ce domaine. Claire, Yann et Nolwenn nous ont chaleureusement ouvert les portes de
leur ferme.
Claire et Yann Yobé, associés à leur fille Nolwenn, sont agriculteurs en polyculture élevage
biologique aux Goublayes (Saint Alban) depuis une trentaine d’années. Ils sont locataires des terres
qu’ils cultivent,(leur bail est d’une durée de 18 ans renouvelable), la ferme ne supporte ainsi pas de
grosses charges de remboursement de prêt. Avant Yann, c’était ses grands-parents, puis ses parents,
qui occupaient cette ferme, ils étaient également locataires.
L’activité principale de la ferme est la production laitière. Avec 40 à 45 vaches, des veaux et des
génisses, ils produisent environ 200 000 litres de lait par an.
Les 71 hectares de la ferme se répartissent en 60 hectares d’herbes à fourrage et dix hectares de
céréales (dont 2 à 3 hectares de blé panifiable). Ils sont en autonomie et n’achètent pas de lisier ou
autre engrais organique à l’extérieur. Pour compenser leur faible production de matières
organiques, ils nourrissent les sols avec les végétaux riches en protéines qui captent l’azote de l’air
(fèves, pois, autres légumineuses, luzerne…)
Ils sont adhérents à Biolait , un groupement de producteurs (1300 fermes sur toute la France) en SAS
(*) qui est géré par les producteurs comme eux. Chaque agriculteur adhérent y a une voix. Le cahier
des charges bio de cette SAS est mieux disant que le cahier des charges bio européen. Leur lait est
vendu majoritairement (plus de 90%) à la grande distribution (notamment Super U), le reste dans les
magasins bio.
Ils produisent également des pommes et font du jus et de la purée de pommes qu’ils
commercialisent en vente directe. Une petite activité de camping à la ferme constitue également un
complément de revenus.
Ils emploient un ouvrier agricole et sont donc 4 personnes en tout à travailler sur leur ferme. Ils
disent vivre décemment de leur activité et ne se plaignent pas. Ils nous expliquent qu’ils sont en
autonomie totale, que leur travail est intéressant et gratifiant, ils sont passionnés par leur métier.
L’agriculture biologique est technique, elle nécessite une grande connaissance des liens entre la
terre, les végétaux et les animaux. Comme Yann le dit : « En agriculture biologique on nourrit les sols
pour nourrir les plantes et les animaux, en conventionnel, on nourrit directement les plantes et les
animaux, voire on appauvrit les sols.»
Claire et Yann sont d’ailleurs très engagés dans la démarche BIO depuis des années, à titre
d’exemple, ils ont participé à créer :
En 1999, le courtil bio à Lamballe (devenu Biocoop depuis)
En 2004 : la binée paysanne
En 2009 : le GFA SolEnBio
D’après eux, il serait tout à fait possible de nourrir la population si toutes les fermes fonctionnaient
selon leur modèle qui est fiable économiquement. Compte tenu de leur longue et grande expérience
dans ce domaine, nous pensons qu’ils ont très certainement raison.
L’agriculture biologique aujourd’hui :
Elle est encadrée par un cahier des charges européen le label Eurobio (ou l’eurofeuille),
En résumé, ce cahier des charges stipule :
• Qu’un produit labellisé bio doit contenir au moins 95% d’ingrédients issus d’une agriculture
biologique
• Qu’aucun produit chimique de synthèse (pesticides, désherbants…) ne doit être utilisé dans
sa production
• Qu’il ne doit pas contenir d’organismes génétiquement modifiés (OGM), ou du moins très
peu : une présence “accidentelle” jusqu’à 0,9% est tolérée
A savoir : selon ce cahier des charges, les maraîchers bio (qui n’ont pas accès à des engrais
organiques bio puisqu’ils ne font pas d’élevage) sont autorisés à utiliser des engrais issus d’élevages
d’animaux nourris et élevés en agriculture conventionnelle. Même si elle est légale, cette pratique
est dénoncée par les agriculteurs bio tels que Yann et Claire puisque pas cohérente avec la démarche
et l’éthique bio.
Différences entre conventionnel et bio / quelques repaires :
En agriculture bio, il faut compter en moyenne 1 hectare d’herbe pour nourrir 1 vache pendant 1 an
(5 tonnes de fourrage). En conventionnel, c’est 2 vaches par hectare, qui seront nourries avec du
maïs et du soja importé, non certifiés Bio.
Pour ce qui est de la culture céréalière, là aussi les rendements sont sans commune mesure : En bio,
on produit 2 à 3 tonnes de blé par hectare, en conventionnel, c’est 8 à 10 tonnes par hectares.
Certes, en agriculture biologique, les rendements sont moins élevés mais elle provoque nettement
moins d’externalités négatives (telles que la pollution des sols et des eaux) qui engendrent des coûts
très importants.
Selon Claire et Yann, si les budgets de la PAC (*) étaient fléchés pour une reconversion progressive de
l’agriculture conventionnelle vers l’agriculture biologique des tas d’économies pourraient être
réalisées (moins de coûts de dépollution, moins de frais de santé etc…).
A titre d’exemple : le montant des aides versées par l’Europe pour soutenir l’agriculture
(traditionnelle et bio) est égal à celui nécessaire à dépolluer les eaux…
D’ailleurs, à la question « Que faudrait-il pour migrer efficacement vers une agriculture 100 % bio ? »,
Yann nous répond que seule une décision politique peut accélérer cette migration : Comme le font
nos voisins allemands, subventionner les agriculteurs qui décideraient de franchir le cap pour
compenser les plus faibles rendements et le surcoût de main d’oeuvre.
Nous pensons, pour notre part, qu’il est grand temps d’aider et de soutenir ceux qui, comme
Nolwenn, Claire et Yann, s’engagent pour nous nourrir et prendre soin de notre planète !
Consommons mieux, consommons bio et consommons près de chez nous !
Fréhel Environnement
JM Gueguen et N Rosselot
(*) SAS : Société par Actions Simplifiée
(*) PAC : Politique Agricole Commune
Pour en savoir davantage :
Fermedesgoublayes.fr
06 78 28 13 98
goublayonsferme@mailo.com